Carin Smuts

Carin Smuts

Carin Smuts, 2017 lauréate du Prix UIA Robert Matthew

Qu’est-ce qui vous a amené à l’architecture ?

Mon père était un ingénieur en mécanique qui a toujours voulu être architecte. Quand j’avais environ

quatre ans, il m’a emmené sur le chantier de notre première maison. C’était l’une des cinq maisons qu’il a conçues et construites au fil des ans. Quand j’ai dû choisir mes études, j’ai choisi le théâtre, tandis que mon père m’a proposé d’étudier l’architecture. C’est ainsi que j’ai commencé à l’étudier.

Au cours de mes études d’architecture, je me suis impliquée dans deux productions théâtrales réalisées avec le personnel et les étudiants de l’école d’architecture de l’Université du Cap. Pendant la 4ème  année, une année de stage pratique, j’ai travaillé sur un kibboutz en Israël. Cela a changé ma vision de la vie et j’ai décidé que je voulais devenir médecin.  Mon père m’a demandé de terminer d’abord mes études d’architecture. J’ai les ai donc terminées et deux ans plus tard, j’ai été acceptée à l’école de médecine. C’est au cours de cette année que j’ai réalisé que tout ce que je voulais, c’était d’être architecte. C’est ainsi que je suis arrivée à l’architecture.

Guga Sthebe Culture and Heritage Village 1999

Quelle est votre philosophie en tant qu’architecte et quels ont été les facteurs clés dans le développement de cette philosophie ?

Ma philosophie en tant qu’architecte est centrée sur les personnes et les solutions holistiques durables. Je pense que les aspects environnementaux, sociaux et économiques doivent s’équilibrer. Cela exige des projets qui répondent aux défis environnementaux et à cet égard, je crois en la conception passive. La cohésion sociale est synonyme de sécurité pour tous. Les aspects économiques concernent plusieurs niveaux dont l’un est l’utilisation de matériaux et de ressources locaux.

Notre architecture est basée sur un processus de collaboration selon lequel les différents acteurs, futurs utilisateurs et professionnels se réunissent pour produire des environnements de qualité. Nous sommes en quelque sorte des chefs d’orchestre faisant jouer de nombreux instruments pour créer une musique agréable à tous. Dans notre cabinet, CS Studio Architects, nous avons également un système où tout le monde participe au processus de conception. Au fil des ans, Urs Schmid et Clint Abrahams sont devenus nos deux principaux collaborateurs.

Kommagas – Eerste Treetjies 1986

Ulwazi, Langa 1989

Quel devrait être le rôle de l’architecture dans le monde d’aujourd’hui ?

Dans le monde actuel, l’architecture a la possibilité de relever de nombreux défis mondiaux. Sur le plan technique, nous pouvons garantir des empreintes carbone minimales pour nos projets. Nous pouvons produire des environnements durables qui prennent en compte le bien-être environnemental, économique et social du contexte dans lequel nous travaillons. Plus important encore, nous pouvons être des facilitateurs afin de créer un monde meilleur pour tous les habitants en réalisant des projets qui promeuvent et encouragent la cohésion sociale. L’architecture peut façonner l’avenir des lieux où nous habitons. Elle peut remettre en question une législation irréaliste et non pertinente pour assurer aux villes un développement urbain plus sain. L’architecture peut relever des défis sociaux et faciliter la construction d’un avenir meilleur pour tous. La conception architecturale peut être utilisée pour construire des ponts entre les gens au lieu de les diviser.

Wesbank Primary School 1999

Quels sont, selon vous, les avantages de l’architecture rurale vernaculaire ?

L’architecture rurale vernaculaire utilise des matériaux locaux et est construite par la population locale elle-même. La technologie est normalement simple et facilement accessible. Le projet tient compte des comportements culturels et des coutumes. Il existe des hiérarchies complexes d’utilisation de l’espace qui ne sont pas évidentes. La réponse au climat est souvent appropriée comme par exemple, la cabane africaine construite en terre avec de petites ouvertures et un toit de chaume traditionnel avec une grande avancée pour protéger les murs.

Dans l’architecture contemporaine, nous pouvons tirer des leçons de l’architecture vernaculaire sans imiter le passé, en l’adaptant au contexte.

Le village culturel et artistique Guga S’thebe est un autre exemple qui s’inspire des villages africains traditionnels (dans ce cas, un village Xhosa). L’utilisation de l’espace polyvalent en forme de cône est le résultat des échanges avec les anciens habitants de Langa que nous avons consultés et qui souhaitaient une cabane traditionnelle. Le cône et la façon dont il se juxtapose aux autres formes représente une véritable architecture contemporaine. Le plan repose sur la mémoire d’un village africain ; les espaces intermédiaires sont des espaces socialement interactifs.

À propos du prix Robert Matthew :

Ce Prix créé en 1978 sous le nom de l’ancien président de l’UIA, Robert Matthew, incarne les objectifs du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat).